DISPOSITIONS PÉNALES

 

 

TEXTES OFFICIELS DIVERS

 

 

 

ARTICLES 259, 262 et 263 DU CODE PÉNAL

 

 

Depuis l’entrée en fonction du nouveau Code pénal, le 1er mars 1994, les articles 259, 262 et 263 de l’ancien Code sont remplacés par les suivants :

 

SECTION VIII – De l’usurpation de signes réservés à l’autorité publique

Article 433-14. — Est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende le fait, par toute personne, publiquement et sans droit :
1° De porter un costume, un uniforme ou une décoration réglementés par l’autorité publique ;
2° D’user d’un document justificatif d’une qualité professionnelle ou d’un insigne réglementés par l’autorité publique ;
3° (...)

Article 433-15. — Est puni de six mois d’emprisonnement et de 7 500 € d’amende le fait, par toute personne, publiquement, de porter un costume ou un uniforme, d’utiliser un véhicule, ou de faire usage d’un insigne ou d’un document présentant, avec les costumes, uniformes, véhicules, insignes ou documents distinctifs réservés aux fonctionnaires de la police nationale ou aux militaires, une ressemblance de nature à causer une méprise dans l’esprit du public.

Article 433-16. — Les infractions définies par les articles 433-14 et 433-15 sont punies de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende lorsqu’elles ont pour objet de préparer ou de faciliter la commission d’un crime ou d’un délit.

 

SECTION IX – De l’usurpation de titres

Article 433-17. — L’usage, sans droit, d’un titre attaché à une profession réglementée par l’autorité publique ou d’un diplôme officiel ou d’une qualité dont les conditions d’attribution sont fixées par l’autorité publique est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende.

Dans le cas de l’autorisation du port d’un Ordre étranger, il est donc formellement interdit de porter d’autres insignes que ceux de l’Ordre et du grade pour lesquels l’autorisation a été accordée, sous les peines édictées en l’article 433-17 du Code pénal.

 

SECTION X – De l’usage irrégulier de qualité

Article 433-18. — Est puni de six mois d’emprisonnement et de 7 500 € d’amende le fait, par le fondateur ou le dirigeant de droit ou de fait d’une entreprise qui poursuit un but lucratif, de faire figurer ou de laisser figurer, dans une publicité réalisée dans l’intérêt de l’entreprise qu’il se propose de fonder ou qu’il dirige :
1° (...)
2° (...)
3° Le nom d’une personne avec mention de la décoration réglementée par l’autorité publique qui lui a été décernée.
Est puni des mêmes peines le fait, par un banquier ou un démarcheur, de faire usage de la publicité visée à l’alinéa qui précède.

 

 

 


 

 

 

LES CONTRAVENTIONS

 

 

Article 131-13. ( du nouveau Code pénal ) — Le montant de l’amende est le suivant :
1° – 38 € au plus pour les contraventions de la 1re classe ;
2° – 150 € au plus pour les contraventions de la 2e classe ;
3° – 450 € au plus pour les contraventions de la 3e classe ;
4° – 750 € au plus pour les contraventions de la 4e classe ;
5° – 1 500 € au plus pour les contraventions de la 5e classe, montant qui peut être porté à 3 000 € en cas de récidive lorsque le règlement le prévoit, hors les cas où la loi prévoit que la récidive de la contravention constitue un délit.

 

 

 


 

 

 

DÉCRET N° 81-1103 du 4 décembre 1981
Modifiant le code de la Légion d'honneur et de la Médaille militaire
en ce qui concerne la création, la collation et le port
de certaines décorations et grades honorifiques

J.O. du 17 décembre 1981 - Page 3431

 

Le Président de la République,
Sur le rapport du Premier ministre, du garde des sceaux, ministre de la justice,
Sur la proposition du grand chancelier de la Légion d'honneur,
Vu le code de la Légion d'honneur et de la Médaille militaire ;
Vu le code pénal, et notamment son article R. 25 ;
Le Conseil d'Etat ( section de l'intérieur ) entendu ;
Le conseil des ministres entendu,
Décrète :

 

Art. 1er. — Il est ajouté au code de la Légion d’honneur et de la Médaille militaire un livre IV intitulé : « Dispositions pénales », comprenant les articles R. 171, R. 172 et R. 173 ci-dessous :

 

Article R. 171. — Est interdite la création ou la collation, par des personnes physiques ou morales privées ou par des personnes morales publiques autres que l’Etat, de décorations ou insignes de distinction honorifiques présentant une ressemblance soit avec des décorations ou insignes conférés par l’Etat français, soit avec des décorations ou insignes conférés par une puissance étrangère souveraine.
Est également interdite la création ou l’attribution de grades ou de dignités dont la détermination présente une ressemblance avec les grades et dignités conférés par l’Etat français ou par une puissance étrangère souveraine.
Les infractions aux dispositions qui précèdent sont punies des peines prévues pour les contraventions de 5e classe.

 

Article R. 172. — Sera puni d’une amende prévue pour les contraventions de 4e classe quiconque aura porté en public des insignes, rubans ou rosettes présentant une ressemblance avec ceux des décorations conférées par l’Etat français ou qui aura fait usage de grades ou dignités dont la dénomination présente une ressemblance avec les grades et dignités conférées par l’Etat.

 

Article R. 173. — Sera puni d’une amende prévue pour les contraventions de 2e classe tout Français qui aura porté, sans avoir obtenu l’autorisation prévue par l’article R. 161, une décoration conférée par une puissance souveraine étrangère.
Sera punie d’une amende prévue pour les contraventions de 3e classe toute personne qui aura porté une décoration étrangère qui n’aurait pas été conférée par une puissance souveraine.

 

Art. 2. — L'alinéa 3 de l'article R. 40 du code pénal ainsi que l'article 8 du décret du 6 novembre 1920 réglementant le port des décorations sont abrogés.

Art. 3. — Le Premier ministre, le garde des sceaux, ministre de la justice et le grand chancelier de la Légion d'honneur sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.

Fait à Paris, le 4 décembre 1981.

François Mitterrand.

Par le Président de la République :
Le Premier ministre, Pierre Mauroy.
Le garde des sceaux, ministre de la justice, Robert Badinter.
Vu pour l'exécution :
Le grand chancelier de la Légion d'honneur, André Biard.

 

 

 


 

 

 

COMMUNIQUÉ DE LA GRANDE CHANCELLERIE DE LA LÉGION D’HONNEUR
PROTECTION DES DÉCORATIONS OFFICIELLES FRANÇAISES

 

 

L’attention du Grand chancelier a été appelée sur la prolifération des insignes et distinctions honorifiques distribués par des associations privées depuis quelques années.
Tout contribue à créer une confusion complète entre les décorations officielles et ces insignes :

  – les termes qui désignent :
 - les insignes : médailles, croix, cravates, plaques, etc. ;
 - les grades : Chevaliers, Officiers, Commandeurs, etc. ;
 - la distinction elle-même : Ordre du Mérite et Dévouement français ;

  – les droits de chancellerie à verser ;

  – les titres dont se prévalent les animateurs de ces associations : Grand maître, chancelier, etc. ;

  – le cérémonial adopté.

Il est rappelé instamment que les insignes créés ou décernés par les associations privées ne sauraient en aucun cas être assimilés ni aux Ordres nationaux ni aux décorations officielles françaises.
Le Grand chancelier de la Légion d’honneur et de l’Ordre national du Mérite met sérieusement en garde les organisateurs et les participants éventuels contre de telles manifestations. Des poursuites judiciaires ou disciplinaires peuvent être exercées contre les animateurs des associations incriminées ou les personnes, titulaires de décorations officielles françaises ou futurs candidats à ces décorations, qui accepteraient de se faire remettre des pseudo-distinctions.
Il est du devoir de chaque membre de l’Ordre de la Légion d’honneur, de chaque Médaillé militaire et de chaque membre de l’Ordre national du Mérite, de signaler les abus à la Grande chancellerie, 1, rue de Solférino, 75700 PARIS.

 

 

 


 

 

 

APPLICATION DES PEINES DISCIPLINAIRES
PRÉVUES PAR LE CODE DE LA LÉGION D’HONNEUR
ET DE LA MÉDAILLE MILITAIRE

 

 

Instruction N° 43000

En vue de l’application éventuelle des peines disciplinaires prévues à l’article R. 89 du Code de la Légion d’honneur et de la Médaille militaire et R. 34 de l’Ordre national du Mérite, les dispositions suivantes seront prises en ce qui concerne les militaires ou assimilés, appartenant ou non à l’armée active, membres de l’Ordre de la Légion d’honneur, médaillés militaires, membres de l’Ordre national du Mérite ou titulaires d’une décoration étrangère, ayant fait l’objet d’une condamnation à une peine criminelle ou correctionnelle ou d’une sanction disciplinaire pour faute grave.

 

Condamnations à une peine criminelle ou correctionnelle par une juridiction militaire

A ) À la diligence du commissaire du gouvernement près du tribunal qui a rendu le jugement et dès que ce dernier est devenu définitif ou exécutoire, les documents ci-après sont transmis dans tous les cas directement au ministre des armées sous la référence de la présente instruction, sous bordereau indiquant, avec les références d’attribution, les décorations ( Légion d’honneur, Médaille militaire, Ordre national du Mérite, décorations étrangères ) mentionnées dans le dossier de l’affaire et dont les intéressés sont titulaires.
  1. – Pour les condamnations qui, en application des dispositions de l’article R. 91 du code, emportent obligatoirement exclusion, c’est-à-dire pour les condamnations pour crime ou à une peine d’emprisonnement sans sursis égale ou supérieure à un an : une expédition du jugement.
  2. – Pour toutes les autres condamnations : une expédition du jugement à laquelle est joint en communication le dossier de procédure.
B ) Lorsqu’il est avisé de la condamnation, le chef de corps ( ou le commandant de l’organisme qui administre l’intéressé ) adresse par la voie hiérarchique au ministre de la Défense ( direction d’arme ou de service intéressée pour transmission à la sous-direction des bureaux du cabinet, bureau des décorations ) une feuille de renseignements.
C ) Les extraits de jugement, les dossiers de procédure et les feuilles de renseignements sont transmis au Grand chancelier de la Légion d’honneur par les soins du ministre de la Défense ( sous-direction des bureaux du cabinet ).

 

Condamnations à une peine criminelle ou correctionnelle par une juridiction non militaire

A ) Il appartient au garde des Sceaux, ministre de la Justice, de transmettre au Grand chancelier de la Légion d’honneur les jugements correspondants.
B ) Lorsqu'il est avisé de la condamnation, le chef de corps ( ou le commandant de l’organisme qui administre l’intéressé ) adresse par la voie hiérarchique au ministre de la Défense, dans les conditions indiquées au paragraphe B ci-dessus, une feuille de renseignements qui est ensuite transmise au Grand chancelier de la Légion d’honneur ou au chancelier de l’Ordre national du Mérite.

 

Sanctions disciplinaires pour fautes contre l’honneur

Le Code de la Légion d’honneur et de la Médaille militaire dispose d’une part, à propos des peines disciplinaires prévues par l’article R. 89 ( exclusion, suspension ou censure ), que tout acte contraire à l’honneur peut entraîner l’application de l’une d’entre elles et d’autre part, en ce qui concerne la procédure, que le ministre de la Défense informe le Grand chancelier de la Légion d’honneur ou le chancelier de l’Ordre national du Mérite des fautes graves commises par les légionnaires, les Médaillés militaires, les membres de l’Ordre national du Mérite et les titulaires d’une décoration étrangère, relevant de son autorité.
En conséquence, pour permettre l’application de ces dispositions, les sanctions énumérées ci-après, prononcées par mesure disciplinaire, seront signalées sous le présent timbre, par le chef de corps ( ou le commandant de l’organisme qui administre l’intéressé ) qui adressera par la voie hiérarchique dans les conditions indiquées au paragraphe B ci-dessus, une feuille de renseignements modèle n° 307/5 accompagnée du dossier de l’affaire ( en communication ) :

  – officiers de l’armée active : mise en réforme, mise en non-activité par retrait d’emploi, admission d’office à la retraite ;

  – officiers de réserve : radiation des cadres d’office, révocation, mise en non-disponibilité pour durée d’un an ;

  – sous-officiers de carrière : mise en réforme, mise en non-activité pour une durée de six mois, radiation d’office des cadres, admission d’office à la retraite ;

  – militaires commissionnés : révocation ou admission d’office à la retraite proportionnelle ou d’ancienneté ;

  – militaires non-officiers autres que les sous-officiers de carrière : cassation, rétrogradation ou résiliation d’office de contrat ;

  – personnels des cadres militaires féminins : abaissement de classe ou de catégorie, résiliation de contrat, retrait de commission, radiation des cadres d’office.

 

Notification des sanctions et inscription sur les pièces matricules

Les peines de l’exclusion et de la suspension sont prononcées :

  – par arrêté du Grand chancelier de la Légion d’honneur dans le cas de condamnations pour crime ou à une peine d’emprisonnement sans sursis, égale ou supérieure à un an ;

  – par décrets du Président de la République dans les autres cas.

Ces décrets ou arrêtés sont publiés au Journal officiel.
La censure est prononcée par arrêté du Grand chancelier. Celui-ci notifie aux intéressés les décisions prises à leur encontre et adresse au ministre des armées copie des décrets ou arrêtés portant exclusion, suspension ou censure, pour tous les cas qui lui ont été soumis par ses soins. Cette notification est ensuite faite par voie hiérarchique dans les conditions indiquées au paragraphe B, pour classement dans les dossiers du personnel.
Nota : la suspension est interruptrice de l’ancienneté dans le grade détenu dans la Légion d’honneur.

 

 

 


 

 

 

LE CODE CIVIL : NATIONALITÉ FRANÇAISE

 

 

Quelques articles extraits du code civil, titre premier bis : De la nationalité française.

 

Article. 23.7. — Le Français qui se comporte en fait comme le national d’un pays étranger peut, s’il a la nationalité de ce pays, être déclaré, par décret après avis conforme du conseil d’État, avoir perdu la qualité de Français.

 

Article. 23.8. — Perd la nationalité française le Français qui, occupant un emploi dans une armée ou un service public étranger ou dans une organisation internationale dont la France ne fait pas partie ou plus généralement leur apportant son concours, n’a pas résigné son emploi ou cessé son concours nonobstant l’injonction qui lui en aura été faite par le Gouvernement.
L’intéressé sera, par décret en Conseil d’État, déclaré avoir perdu la nationalité française si, dans le délai fixé par l’injonction, délai qui ne peut être inférieur à quinze jours et supérieur à deux mois, il n’a pas mis fin à son activité.
Lorsque l’avis du Conseil d’État est défavorable, la mesure prévue à l’alinéa précédent ne peut être prise que par décret en Conseil des ministres.

 

Article. 25. — L’individu qui a acquis la qualité de Français peut, par décret pris après avis conforme du conseil d’État, être déchu de la nationalité française :
1° – S’il est condamné pour un acte qualifié crime ou délit contre la sûreté de l’État ;
2° – S’il est condamné pour un acte qualifié crime ou délit prévu et puni par les articles 109 à 131 du code pénal;
3° – S’il est condamné pour s’être soustrait aux obligations résultant pour lui du code du service national ;
4° – S’il s’est livré au profit d’un État étranger à des actes incompatibles avec la qualité de Français et préjudiciables aux intérêts de la France ;
5° – S’il a été condamné en France ou à l’étranger pour un acte qualifié crime par la loi française et ayant entraîné une condamnation à une peine d’au moins cinq années d’emprisonnement.

 

 

 


 

 

 

ARCHIVES

( Liste non exhaustive )

Source :
Bibliothèque nationale de France

 

 

DÉCRET du 15 septembre 1792
relatif aux citoyens qui seraient revêtus
d'une décoration qu'ils n'ont pas le droit de porter,
et aux commissaires des municipalités chargés de faire des visites domiciliaires

 

 

Art. 1er. — Il est expressément défendu à tout citoyen de se revêtir d'une décoration décrétée pour les juges, les administrateurs, les magistrats du peuple et tous autres officiers publics, à moins qu'il n'ait le caractère requis par la loi pour pouvoir la porter.

Art. 2. — Tout citoyen qui sera trouvé revêtu d'une décoration qu'il ne sera point autorisé par la loi à porter, sera puni de deux années de fers.

Art. 3. — Si le citoyen trouvé revêtu d'une décoration qu'il n'a pas le droit de porter, est convaincu d'avoir fait des actes d'autorité que l'officier public a seul le droit de faire, il sera puni de mort.

Art. 4. — Tous commissaires de municipalités ou de comités de sections, chargés de faire des visites, perquisitions ou actes d'autorité publique dans les maisons, seront munis de deux expéditions de l'acte qui constitue leur pouvoir spécial, et tenus d'en remettre une au citoyen chez lequel ils feront lesdites visites et perquisitions.

Art. 5. — Lorsque les visites, perquisitions, ou actes d'autorité se feront, en exécution d'une loi particulière, d'une délibération légale, dans toute l'étendue d'une commune, les commissaires seront tenus d'exhiber leurs pouvoirs et de les faire connaître aux citoyens qui les demanderont.

 

 

 


 

 

 

LOI du 30 avril 1886
relative à l'usurpation des médailles et récompenses industrielles

J.O. du 12 mai 1886 - Page 2173

 

 

Le Sénat et la Chambre des députés ont adopté,
Le Président de la République promulgue la loi dont la teneur suit :

Art. 1er. — L'usage des médailles, diplômes, mentions, récompenses ou distinctions honorifiques quelconques décernés dans des expositions ou concours, soit en France, soit à l'étranger, n'est permis qu'à ceux qui les ont obtenus personnellement et à la maison de commerce en considération de laquelle ils ont été décernés. Celui qui s'en sert doit faire connaître leur date et leur nature, l'exposition ou le concours où ils ont été obtenus et l'objet récompensé.

Art. 2. — Seront punis d'une amende de 50 à 6,000 fr., et d'un emprisonnement de trois mois à deux ans, ou de l'une de ces deux peines seulement :
1° ceux qui, sans droit et frauduleusement, se sont attribués publiquement les récompenses ou distinctions mentionnées à l'article précédent ;
2° ceux qui, dans les mêmes conditions, les auront appliquées à d'autres objets que ceux pour lesquels elles avaient été obtenues ou qui s'en seront attribués d'imaginaires ;
3° ceux qui les auront indiquées mensongèrement sur leurs enseignes, annonces, prospectus, factures, lettres ou papiers de commerce ;
4° ceux qui s'en seront indûment prévalus auprès des jurys des expositions ou concours.

Art. 3. — Seront punis des mêmes peines ceux qui, sans droit et frauduleusement, se seront prévalus publiquement de récompenses, distinctions ou approbations accordées par des corps savants ou des sociétés scientifiques.

Art. 4. — L'omission des indications énumérées dans le second paragraphe de l'article 1er sera punie d'une amende de 25 à 3,000 francs.

Art. 5. — Les tribunaux pourront prononcer la destruction ou la confiscation, au profit des parties lésées, des objets sur lesquels les fausses indications auront été appliquées.
Ils pourront prononcer l'affichage et l'insertion de leurs jugements.

Art. 6. — L'article 463 du Code pénal est applicable aux délits prévus et punis par la présente loi.

Art. 7. — La présente loi est applicable à l'Algérie et aux colonies.

La présente loi, délibérée et adoptée par le Sénat et par la Chambre des députés, sera exécutée comme loi de l'Etat.

Fait à Paris, le 30 avril 1886.

Jules Grévy.

Par le Président de la République :
Le ministre du commerce et de l'industrie, Edouard Lockroy.

 

 

 


 

 

 

NOTE ministérielle du 8 février 1896
relative aux militaires titulaires de croix ou médailles, qui s'attireraient une condamnation

Journal Militaire - Année 1896 - Premier semestre - Page 433

 

 

( 2e Direction : Justice militaire. )
[B. O., p. r., p. 197.]

Paris, le 8 février 1896.

Les lois et décrets relatifs aux médailles commémoratives des expéditions et opérations militaires, ont appliqué aux titulaires de ces médailles la législation disciplinaire de la Légion d'honneur.
Par suite, il convient de procéder, à l'égard des militaires décorés de ces médailles, qui viendraient à encourir une condamnation, ainsi qu'il est prescrit par les articles 40 du décret du 16 mars 1852, 5 du décret du 24 novembre de la même année et 151 du Code de justice militaire, pour les membres de la Légion d'honneur et les décorés de la Médaille militaire ou d'ordres étrangers.
En conséquence, il y a lieu d'adresser au Ministre de la guerre ( Direction de la cavalerie ; Justice militaire ), dès que le jugement sera devenu exécutoire, le dossier de la procédure concernant les individus membres de la Légion d'honneur, décorés de la Médaille militaire, de médailles commémoratives ou d'ordres étrangers qui seront condamnés par un conseil de guerre de l'armée de terre, quelle que soit la nature de la peine prononcée contre eux.
Ce dossier sera accompagné d'une expédition du jugement ( formule n° 16 bis ) qui indiquera les condamnations encourues antérieurement et mentionnera si le condamné s'est pourvu ou non en révision, ainsi que la date du jour où le jugement est devenu définitif pour recevoir son exécution à compter du...
Il demeure entendu que, pour les condamnés à une peine afflictive et infamante, on se bornera à envoyer un extrait du jugement ( formule n° 18 ), mais en indiquant la date exacte du jour où la dégradation militaire aura été subie.
Sont abrogées toutes dispositions contraires aux prescriptions de la présente note, qui remplace les circulaires des 20 janvier 1857, 26 avril 1858, 27 janvier 1860, 27 mai 1861, 28 avril 1864, 18 avril 1868 et la note du 15 février 1886.

 

 

 


 

 

 

CIRCULAIRE du 27 septembre 1897
réglementant le port des décorations étrangères

B.O. du ministère de l'intérieur - 1897 - N° 9 - Page 301

 

 

Ministère de la justice.

Monsieur le Procureur général,
M. le Grand Chancelier de la Légion d'honneur m'a fait connaître que le nombre des personnes qui se montrent publiquement porteurs de rubans ou insignes d'ordres étrangers est de beaucoup supérieur à celui des autorisations accordées par décret, après avis du Conseil de l'Ordre de la Légion d'honneur, conformément aux prescriptions du décret du 13 juin 1853.
Il est notoire d'autre part, que les dispositions de l'article 6 du décret du 10 mars 1891 qui réglemente le port des décorations étrangères ne sont pas toujours observées ; je suis informé, en effet, qu'un grand nombre de titulaires des différents ordres étrangers énumérés dans plusieurs décisions présidentielles, et dont vous trouverez la nomenclature inscrite au tableau annexé à la présente circulaire, ne se conforment pas à l'obligation, insérée au décret d'autorisation, ou imposée par les décisions présidentielles, de porter, avec la rosette ou le ruban, une croix d'un diamètre au moins égal à celui de la rosette ou à la largeur du ruban.
Il importe de tenir la main à l'observation stricte des prescriptions légales que je viens de rappeler et qui ont pour objet d'assurer aux décorations étrangères la considération qui leur est légitimement due et d'éviter toute confusion entre les insignes de certains ordres étrangers et ceux de l'ordre national de la Légion d'honneur.
Je vous prie, en conséquence, de donner les instructions nécessaires pour que les procès-verbaux soient dressés :

1° Contre les personnes qui portent des décorations étrangères, pour lesquelles elles n'ont pas obtenu l'autorisation requise ;
2° Contre celles qui ne se soumettent pas, en ce qui concerne le port de ces décorations, aux prescriptions du décret d'autorisation et des décisions présidentielles précitées.
Les infractions au décret du 13 juin 1853 devront donner lieu à des poursuites correctionnelles par application de l'article 259 du Code pénal.
Les procès-verbaux dressés pour contravention aux décisions présidentielles ou pour violation des conditions spéciales prévues par le décret d'autorisation seront envoyés à ma Chancellerie et transmis par mes soins à M. le Grand Chancelier de la Légion d'honneur.

*****

ANNEXE

Tableau des décorations étrangères qui ne peuvent être portées sans une croix d'un diamètre au moins égal à celui de la rosette ou à la largeur du ruban.

DÉCISION PRÉSIDENTIELLE DU 11 AVRIL 1882

AUTRICHE. Ordre de François-Joseph et du Mérite. Rouge. – Ordre de Léopold. Rouge, liséré blanc.

BELGIQUE. Ordre de Léopold. Rouge, lie de vin. – Croix civique. Rouge, lisérés jaune et noir.

BRÉSIL. Ordre du Christ. Rouge, liséré bleu.

CAMBODGE. Croix du Cambodge. Rouge, liséré vert.

ESPAGNE. Ordre du Mérite naval. Rouge, bande verticale jaune.

HAWAÏ. Ordre de Kaméhaméha. Rouge, liséré blanc.

HESSE. Ordre de Philippe le Magnanime. Rouge, lisérés bleus.

HONDURAS. Ordre de Santa Rosa. Rouge, bandes verticales bleues et blanches.

ITALIE. Ordre de la Couronne. Rouge et bande verticale blanche au centre.

PÉROU. Médaille d'honneur. Rouge, bande verticale bleue.

PORTUGAL. Ordre du Christ. Rouge.

ROUMANIE. Ordre de l'Etoile. Rouge, liséré bleu.

RUSSIE. Ordre de Sainte-Anne. Rouge, liséré jaune. – Ordre de Saint-Stanislas. Rouge, liseré blanc. – Ordre d'Alexandre Newski. Rouge.

SAINT-SIÈGE. Ordre de Saint-Grégoire le Grand. Rouge, liséré jaune. – Ordre du Christ. Rouge.

SERBIE. Ordre de Takovo. Rouge, liséré bleu et blanc.

SIAM. Ordre de l'Eléphant blanc. Rouge, liséré vert, jaune et bleu.

SUÈDE ET NORVÈGE. Ordre de Saint-Olaf. Rouge, liséré bleu et blanc.

TADJOURAH. Nichan El-Anouar. Rouge, liséré bleu et blanc, bande verticale noire.

TUNISIE. Ordre du Nichan. Vert, liséré rouge.

TURQUIE. Ordre du Medjidié. Rouge, liséré vert.

ZANZIBAR. Ordre de l'Etoile brillante. Rouge, liséré blanc.

DÉCISION PRÉSIDENTIELLE DU 8 JUIN 1885

SERBIE. Ordre de l'Aigle blanc. Rouge, liséré bleu.

DÉCISION PRÉSIDENTIELLE DU 10 JUIN 1897

MONACO. Ordre de Saint-Charles. Rouge et blanc.

DÉCISION PRÉSIDENTIELLE DU 16 AVRIL 1896

GRAND-DUCHÉ DE SAXE-WEIMAR. Ordre de la Vigilance et du Faucon blanc. Rouge.

DÉCISION PRÉSIDENTIELLE DU 29 JUILLET 1896

BULGARIE. Ordre de Saint-Alexandre. Rouge.

 

 

 


 

 

 

DÉCRET du 12 décembre 1916
relatif à l'interdiction aux condamnés civils ou militaires
de porter les médailles commémoratives ou coloniales pendant la durée de leur peine

J.O. du 4 janvier 1917 - Page 99

 

 

RAPPORT AU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

Monsieur le Président,
Le décret du 24 février 1916, pris sur le rapport de M. le grand chancelier de la Légion d'honneur, spécifie dans son article 1er que les dispositions relatives à la discipline des membres de la Légion d'honneur cessent d'être applicables aux titulaires des différentes médailles commémoratives de campagne de guerre et de la médaille coloniale.
Ces médailles perdant ainsi le caractère de distinction personnelle, il est hors de doute que l'interdiction de les porter ne peut plus se justifier, par des raisons d'indignité personnelles aux titulaires.
La possibilité d'en réglementer le port ne peut donc plus être ouverte que pour des raisons d'ordre et de discipline spéciales aux milieux dans lesquels se trouvent les intéressés.
Or, les raisons de cette nature font obstacle à ce que les titulaires de ces médailles qui, par suite de crimes, délits graves ou inconduite notoire, ont encouru les rigueurs de la loi, soient admis à les porter au moins pendant la durée de leur peine.
Il nous a paru utile, en conséquence, d'exclure par une disposition réglementaire formelle, du droit de porter toute médaille commémorative ou coloniale, les titulaires civils, militaires ou marins condamnés à des peines privatives de liberté, pendant leur détention ainsi que tous les hommes envoyés dans les sections spéciales, sections d'exclus, pendant leur présence dans ces établissements ou sections.
Si vous partagez cette manière de voir, nous avons l'honneur de vous prier de vouloir bien revêtir de votre signature, le projet de décret ci-joint.
Veuillez agréer, monsieur le Président, l'hommage de notre respectueux dévouement.

Paris, le 12 décembre 1916.

Le garde des sceaux, ministre de la justice, René Viviani.
Le ministre de la guerre, Roques.
Le ministre de la marine, Lacaze.
Le ministre des colonies, Gaston Doumergue.

*****

DÉCRET

Le Président de la République française,
Sur le rapport du garde des sceaux, ministre de la justice, des ministres de la guerre, de la marine et des colonies ;
Vu le décret du 24 février 1916,

Décrète :

Art. 1er. — Sont exclus du droit de porter toute médaille commémorative ou coloniale :
1° Les titulaires civils, militaires ou marins, condamnés à des peines privatives de liberté, pendant leur détention ;
2° Les titulaires militaires ou marins envoyés dans les sections spéciales, pendant leur séjour dans ces sections ;
3° Les titulaires exclus de l'armée, pendant leur séjour dans les sections d'exclus.

Art. 2. — Le garde des sceaux, ministre de la justice, les ministres de la guerre, de la marine et des colonies sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret.

Fait à Paris, le 12 décembre 1916.

R. Poincaré.

Par le Président de la République :
Le garde des sceaux, ministre de la justice, René Viviani.
Le ministre de la guerre, Roques.
Le ministre de la marine, Lacaze.
Le ministre des colonies, Gaston Doumergue.

 

 

 


 

 

 

LOI du 11 janvier 1936
tendant à interdire de se prévaloir dans un but de réclame financière
du titre d'ancien fonctionnaire ou des distinctions honorifiques de la Légion d'honneur

J.O. du 15 janvier 1936 - Page 658

 

 

Le Sénat et la Chambre des députés ont adopté,
Le Président de la République promulgue la loi dont la teneur suit :

Article unique. — Seront punis d'une amende de 500 francs à 3.000 francs et de un à six mois d'emprisonnement, ou de l'une de ces deux peines seulement, les fondateurs, les directeurs ou gérants de sociétés ou d'établissements à objet commercial, industriel ou financier, qui auront fait ou laissé figurer le nom d'un ancien membre du gouvernement, d'un fonctionnaire ou ancien fonctionnaire ou d'un membre de la Légion d'honneur, avec mention de sa qualité, sur tous prospectus, annonces, tracts, réclames ou documents quelconques, publiés dans l'intérêt de l'entreprise qu'ils dirigent ou qu'ils se proposent de fonder.
Les mêmes peines seront applicables à tous banquiers ou démarcheurs qui auront fait usage desdits prospectus, annonces, tracts, réclames ou documents.
En cas de récidive, les peines ci-dessus prévues pourront s'élever à 10.000 francs d'amende et un an d'emprisonnement.

La présente loi, délibérée et adoptée par le Sénat et par la Chambre des députés, sera exécutée comme loi de l'Etat.

Fait à Paris, le 11 janvier 1936.

Albert Lebrun.

Par le Président de la République :
Le garde des sceaux, ministre de la justice, Léon Bérard.

 

 

 


 

 

 

LOI du 20 novembre 1940
réglementant le port des insignes, emblèmes et décorations

J.O. de l'Etat français du 6 décembre 1940 - Page 5986

 

 

Nous, Maréchal de France, chef de l'Etat français,
Sur le rapport du ministre secrétaire d'Etat à l'intérieur,
Le conseil des ministres entendu,

Décrétons :

Art. 1er. — Est interdit le port, dans un lieu public, sans autorisation préalable délivrée par le préfet de police à Paris et par le préfet, dans les départements, des insignes, emblèmes et décorations de toute nature, à l'exception des décorations décernées par l'Etat français et des décorations étrangères dont le port a été autorisé dans les conditions prévues par le décret du 13 juin 1853.

Art. 2. — Sur la demande qui en sera faite par son représentant responsable, tout groupement ou association dont les adhérents arborent un insigne ou emblème distinctif pourra obtenir une autorisation collective valable pour tous ses membres.
Copie de cette autorisation, certifiée conforme par lui, sera remise par le représentant responsable du groupement ou de l'association à chaque adhérent.
Le port individuel de l'insigne ou de l'emblème est interdit à tout adhérent qui ne sera pas détenteur de la copie de l'autorisation collective.

Art. 3. — L'autorisation délivrée en application des articles qui précèdent pourra être révoquée à tout instant par l'autorité qui l'a accordée.

Art. 4. — Après l'expiration d'un délai d'un mois, à compter de la publication du présent décret au Journal officiel, toute infraction aux dispositions qui précèdent sera punie d'un emprisonnement de six mois à deux ans.

Art. 5. — Le présent décret sera publié au Journal officiel et exécuté comme loi de l'Etat.

Fait à Vichy, le 20 novembre 1940.

Ph. Pétain.

Par le Maréchal de France, chef de l'Etat français :
Le garde des sceaux, ministre secrétaire d'Etat à la justice, Raphaël Alibert.
Le ministre secrétaire d'Etat à l'intérieur, Marcel Peyrouton.
Le vice-président du conseil, ministre secrétaire d'Etat aux affaires étrangères, Pierre Laval.

 

 

 


 

 

 

LOI du 24 décembre 1940
réglementant aux colonies le port des insignes, emblèmes et décorations

J.O. de l'Etat français du 26 décembre 1940 - Page 6274

 

 

Nous, Maréchal de France, chef de l'Etat français,
Le conseil des ministres entendu,

Décrétons :

Art. 1er. — Sont rendues applicables dans les territoires relevant du secrétariat d'État aux colonies les dispositions de la loi du 20 novembre 1940 réglementant le port des insignes, emblèmes et décorations.

Art. 2. — Les pouvoirs attribués au préfet de police et aux préfets sont dévolus aux gouverneurs généraux ou gouverneurs.

Art. 3. — Sont abrogées toutes dispositions contraires.

Art. 4. — Le présent décret sera publié au Journal officiel et exécuté comme loi de l'Etat.

Fait à Vichy, le 24 décembre 1940.

Ph. Pétain.

Par le Maréchal de France, chef de l'Etat français :
Le ministre secrétaire d'Etat aux affaires étrangères, P.-E. Flandin.
Le garde des sceaux, ministre secrétaire d'Etat à la justice, Raphaël Alibert.
Le secrétaire d'Etat aux colonies, Al Platon.

 

 

 


 

 

 

DÉCRET du 27 février 1941
Insignes, emblèmes, décorations

J.O. de l'Etat français du 4 mars 1941 - Page 999

 

 

Nous, Maréchal de France, chef de l'Etat français,
Sur le rapport de l'amiral de la flotte, ministre secrétaire d'Etat à l'intérieur,
Vu la loi du 20 novembre 1940 réglementant le port des insignes, emblèmes et décorations,

Décrétons :

Art. 1er. — Les dispositions de la loi susvisée du 20 novembre 1940 sont applicables à l'Algérie.

Art. 2. — Le délai d'un mois prévu à l'article 4 de cette loi courra à partir de la date de l'insertion du présent décret au Journal officiel de l'Algérie.

Art. 3. — L'amiral de la flotte, ministre secrétaire d'Etat à l'intérieur, est chargé de l'exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de l'Etat français et inséré au Journal officiel de l'Algérie.

Fait à Vichy, le 27 février 1941.

Ph. Pétain.

Par le Maréchal de France, chef de l'Etat français :
L'amiral de la flotte, ministre secrétaire d'Etat à l'intérieur, Al Darlan.

 

 

 


 

 

 

DIVERS

 

 

LES DÉCORATIONS PRIVÉES

 

L'article suivant est extrait du numéro 4, page 17, du journal "Le Vétéran" en date du 20 février 1912.

De nombreux lecteurs nous demandent si certaines décorations d'ordre privé, qui leur ont été attribuées, peuvent être portées lorsqu'ils revêtent l'uniforme militaire. Le caractère illicite du port de ces insignes a été souvent discuté et le doute a pu naître de ce que quelques-uns d'entre eux sont décernés à la suite de propositions qui ont un caractère absolument officiel.

C'est ainsi que l'instruction du 10 février 1908 sur le service courant prévoit, en faveur des militaires, des propositions pour des récompenses décernées par la Ligue nationale contre l'alcoolisme ( société française de tempérance ), la Société protectrice des animaux, l'Assistance aux animaux, la Société nationale d'encouragement au bien. Ces diverses Sociétés délivrent des récompenses, qui consistent en diplômes et en médailles suspendues à des rubans ; il semblerait tout naturel de croire que les insignes de ce genre sont destinés à être épinglés à l'uniforme.

Or, il n'en est pas ainsi, car aucun texte n'a encore modifié le principe posé par l'ordonnance du 18 avril 1824, qui donne au roi « seul » le droit de conférer un ordre, principe rappelé dans le décret du 10 juin 1853 et confirmé par une décision impériale ainsi conçue : « Sont considérées comme illégalement ou abusivement obtenues toutes décorations qualifiées françaises ou étrangères et conférées sous quelque titre que ce soit par des chapitres, corporations, confréries, prétendus grands maîtres ou leurs délégués, etc... »

Nous empruntons, en outre, au rapport de M. le député Louis Marin sur le budget de la Légion d'honneur le texte d'une circulaire adressée, le 30 juin 1910, aux préfets, par M. Briand, alors président du Conseil et ministre de l'Intérieur. Ce texte est le suivant : « Il m'est signalé, de différents côtés, que des Sociétés délivrent différentes distinctions honorifiques ayant le caractère de décorations et comportant le port de différents rubans. Ces concessions de décorations, non autorisées par la grande chancellerie de la Légion d'honneur, sont illégales et exposent ceux qui les portent à des poursuites judiciaires. Je vous prie de vouloir bien tenir la main à ce que les abus signalés ne se représentent plus et de déférer aux parquets toutes les infractions dont vous viendriez à avoir connaissance. Vous voudrez bien montrer la plus grande vigilance pour mettre un terme aux agissements des Sociétés signalées qui seraient de nature à jeter un discrédit sur les distinctions régulièrement concédées. »

On est donc obligé de convenir que le port des décorations privées est illégal et qu'il constitue un délit prévu par l'article 259 du Code pénal. Toutefois, en raison du texte même de l'article 259 : « Toute personne qui aura publiquement porté un costume, un uniforme ou une décoration qui ne lui appartiendrait pas sera punie d'un emprisonnement de six mois à deux ans », et, en raison surtout de la solennité avec laquelle certaines décorations privées sont décernées, souvent en présence d'un membre du gouvernement, il n'est pas étonnant que les titulaires arborent de bonne foi à la boutonnière ou sur l'uniforme, la distinction qu'ils ont reçue, sans songer à commettre le délit de port illégal de décorations.

Comme le dit l'honorable M. Marin, le texte de l'article 259 demanderait à être modifié en le rendant moins rigoureux et plus explicite. Nous ajoutons qu'il conviendrait peut-être aussi de donner un caractère nettement officiel à quelques décorations privées aujourd'hui très connues, et dont l'attribution ne peut qu'offrir des avantages en se plaçant au point de vue social.

Pour terminer, nous indiquons ci-après les Sociétés les plus connues qui délivrent des décorations dont le port n'est toléré que dans les réunions privées :

– Société nationale d'encouragement au bien ( médaille suspendue à un ruban vert et liserés noirs ) ;

– Société du Mérite national ( médailles d'honneur et croix dite de l'ordre du Mérite comportant les grades de commandeur, d'officier et de chevalier, ruban violet avec liserés rouges ) ;

– Société nationale de sauvetage ( médaille suspendue à un ruban rouge et vert par bandes verticales ) ;

– Société nationale d'encouragement au mérite ( médaille d'argent suspendue à un ruban ) ;

– Ligue de l'intérêt public ( médaille dite du Bien public ) ;

– Société internationale de secours aux blessés ( croix de bronze suspendue à un ruban blanc à croix rouge dite médaille des ambulances ) ;

– Ligue nationale humanitaire ( ruban noir bordé de violet ) ;

– L'Union universitaire ( croix d'émail blanc suspendue à un ruban orange ) ;

– Société de l'Alliance française ( médaille à bélières et ruban à bande tricolore verticale sur fond bleu pâle ) ;

– Société des Conférences populaires ;

– Société des vétérans des armées de terre et de mer.

 

 

 


 

 

 

"AFFAIRES" & "SCANDALES"

Compilation, non exhaustive, de quelques "Affaires" et "Scandales" relatés par la presse.

Source :
Bibliothèque nationale de France

 

 

LE SCANDALE DES DÉCORATIONS
sous la IIIe République

 

 

Voir la page spécifique qui est dédiée au procès de cette célébrissime affaire.

 

 

 


 

 

 

RÉCIPROCITÉ
Journal "L'Orient", Organe spécial des Intérêts de l'Empire Ottoman, du 7 avril 1901 - Numéro 15

 

 

Un certain nombre de journaux français se plaisent à publier des correspondances hostiles à la Turquie ou à recueillir dans les journaux étrangers tous les racontars imaginables sur notre pays et notre Souverain. En échange et sans parti pris d'ailleurs, nous croyons de notre droit de mettre sous les yeux de nos lecteurs, des faits divers tirés de journaux français eux-mêmes qui leur permettront de constater qu'il n'y a rien de parfait sous le soleil, pas plus en France qu'ailleurs. Ce sera de bonne guerre.
N. de la R.

Sous le titre : Une basse Calomnie nous consacrions il y a quelques temps un article pour répondre à quelques odieuses accusations du Français. Ce journal prétendait qu'en Turquie les grades dans l'armée et les décorations sont à la disposition du plus offrant, et cela, grâce à quelques fonctionnaires oublieux de leurs devoirs et du serment de fidélité...

Et le Français, avec la légèreté qui caractérise toutes ses informations, citait les noms de deux ou trois fonctionnaires, respectés entre tous chez nous, pour leur caractère et la dignité de leur vie. On se demandait où voulait bien en venir M. Charles Laurent, le grand leader du Français dans cette campagne maladroite.

Était-ce bien en Turquie qu'il y avait trafic des décorations ? Il savait bien que non, lui, qui avait fait une si ardente campagne dans l'affaire qui précipita Grévy du pouvoir... Tout nous portait à croire que c'était le manque de copie sérieuse qui avait poussé les préposés à la cuisine du Français à exhiber ces vieilleries qui servent éternellement à certains.

Le hasard nous a servi merveilleusement pour nous démontrer que l'article que le Français consacrait à notre pays et aux prétendus trafics qui y auraient cours, cet article, disons-nous, n'était que le résumé singulièrement modifié d'une cause judiciaire qui fit du bruit il y a quelque temps.

Oh ! n'allez pas croire qu'il y a longtemps ! C'est d'avant hier, à peine de quelques années. Il y en a qui y ont joué un rôle, qui continuent à se monter souvent en scène. Ils se risquent même au premier rang... Audaces fortuna juvat.

Et, ils continuent ainsi jusqu'à ce qu'ils soient repincés. L'histoire est édifiante du reste. On la lira avec intérêt. Aucun pacha n'y est mêlé, n'en déplaise au Français. Il n'y est fait mention d'aucune décoration Ottomane. On parle bien d'un Nicham mais il doit fleurir en Tunisie. Cela porte à croire que le trafic est article d'exportation. Voici le compte-rendu judiciaire en question :

Une Agence pour décorations, etc.

Il serait difficile de trouver des prévenus plus corrects et plus distingués d'allure que les trois jeunes gens qui s'asseyaient hier sur les bancs de la police correctionnelle. Tous trois ont l'air de parfaits gentlemen. Le premier, nommé D..., est, un jeune rentier de vingt-huit ans, le second, S..., un ancien commissaire du gouvernement français à l'exposition de Melbourne. Le dernier C., est un ancien secrétaire de l'Institut agronomique, inventeur de l'armoire géologique, etc.

D'après la prévention qui pèse sur eux, ils se seraient associés pour faire croire aux ambitieux naïfs que, en raison des relations dont ils disposaient et des influences officielles qui leur étaient dévouées, ils pouvaient combler leurs vœux, quels qu'ils soient, mais moyennant honoraires. En un mot, ces trois individus tenaient boutique ouverte de décorations, de préfectures, d'ambassades, etc.

Il y avait même un tarif dans cette agence Tricoche et Cacolet. La croix de Chevalier du Christ du Portugal, par exemple, coûtait, chez eux, 3.000 francs ; celle de Commandeur 6.000 francs ; le ruban de Chevalier du Nicham-lftikar était vendu 2.500 francs ; celui de la Légion d'Honneur 2.500 francs, enfin le titre de baron revenait à 30.000 francs.

En général, dès l'origine des pourparlers, il fallait s'engager auprès de la Société B... et Cie à lui abandonner une somme importante préalablement déposée chez un notaire, et qui devait être remise en cas d'insuccès ; mais B... et consorts exigeaient en outre quelques acomptes pour démarches, pots de vin, etc. C'étaient là leurs petits bénéfices, et c'est pourquoi ils sont inculpés non seulement de manœuvres frauduleuses résultant du crédit imaginaire dont ils se targuaient, mais aussi d'escroquerie.

A l'audience, ceux qui ont la contenance la plus piteuse, ce ne sont pas les prévenus mais bien les témoins. Ils ont presque tous honte d'approcher de la barre. Beaucoup, il est vrai, n'ont pas même comparu, ce qui leur a valu une amende de 100 francs. Cependant, on apprend qu'un nommé Dublet a remis 2.000 francs à l'agence pour obtenir une fourniture d'équipements militaires qui ne lui a pas été accordée.

M. Ménier, directeur de la maison de blanc du boulevard des Capucines, remît 3.000 francs pour avoir la décoration. Cette somme était destinée à acheter un député besogneux mais influent et on lui montra, en effet, une facture d'un député sous-secrétaire d'Etat, constituant une espèce de reçu de cette somme, qui ne l'engageait à rien. M. Ménier la prit pour une lettre authentique.

Un M. de Molen demanda une place de préfet. Cette espérance lui coûta 10.000 frs. On finit par lui dire un jour qu'on avait de mauvais renseignements politiques sur son compte et que le succès serait difficile.

M. Bellanger, un autre témoin, voulait aussi du galon. Il demandait la croix du Portugal pour son père, celle du Nicham pour son beau-père, et la croix de la Légion d'honneur pour lui. Tout ce galon s'est payé 10.000 francs, que l'agence a, il est vrai, restitués.

Il nous faudrait toute une colonne pour énumérer toutes les demandes adressées à B... et Cie. La plus importante cependant fut celle de M. Villecoq, qui supplia M. S... de le faire exempter du service militaire. On lui répondit que le coût serait de 50,000 fr. Villecoq les versa. On les lui rendit cependant quand on vit qu'il était déclaré bon pour le service.

Chacun des prévenus s'est efforcé à l'audience de prouver que le rôle qu'il avait joué était insignifiant, et que l'argent reçu, n'était que le salaire légitime de démarches avouables. Nous verrons ce que le tribunal en pense.

Hier, après le réquisitoire de M. le substitut Jacomy et les plaidoiries de MM. Millerand, Michot et Ducuing, le tribunal a renvoyé le prononcé de son jugement à mardi prochain.

La 8e Chambre correctionnelle a condamné B... à deux ans de prison, S... à huit mois et C. à six mois de la même peine.

 

 

 


 

 

 

Le trafic des décorations
"Journal des Débats Politiques et Littéraires" du 19 avril 1911 - Numéro 5350

 

 

M. Tortat, juge d'instruction, a reçu, hier, au Palais, la visite de M. Turness, officier de réserve, courtier d'assurances, qui habite Neuilly.

J'étais, a-t-il raconté, entré en relations avec M. Guillaume Valensi à propos des Sociétés de bienfaisance dont il s'occupait. Un jour, je lui fis part de mon désir d'obtenir l'ordre du Nicham-Iftikar. « Rien de plus facile ! » dit-il. Et il m'adressa à son ami Clementi. Je vis celui-ci en présence de M. Evrard. Il me proposa d'abord la décoration de la Société du bien public, puis les palmes. Je n'avais que faire de son appui à cet égard, étant sur le point de les obtenir par une autre voie. J'insistai donc pour le Nicham-Iftikar.

— Vous aurez le diplôme, me dit alors mon interlocuteur ; c'est entendu.

— Il y a des droits de chancellerie, sans doute ! interrogeai-je.

— Une bagatelle quatre-vingts francs !

Je versai cette somme et le diplôme me fut délivré. Mais j'ai grand'peur qu'il ne soit faux ; c'est pourquoi j'ai cru devoir saisir la justice de cette histoire.

De minutieuses perquisitions ont été opérées hier au domicile de Valensi, à Neuilly, chez Clementi, rue aux Moines, et aux sièges de la Ligue humanitaire nationale et de la Fédération de l'encouragement à l'ordre laïque. Ces opérations n'ont pas donné de résultats intéressants.

Ajoutons que la journée d'hier a été marquée par la mise en cause, par Valensi, de M. Meulemans, directeur de la Presse diplomatique, qu'il accuse d'avoir détenu les diplômes du Nicham que Clementi et lui s'occupaient de négocier.

D'après les bruits qui circulaient hier soir dans les milieux judiciaires, plusieurs arrestations auraient été décidées pour aujourd'hui. M. Clementi a déclaré à M. le juge Tortat avoir reçu d'une femme, dont il a cité le nom, des diplômes de palmes qu'il avait remis à Valensi et où le nom du titulaire était laissé en blanc. Ces diplômes portaient la signature du chef de cabinet de M. Doumergue, ancien ministre de l'instruction publique ; mais la date mentionnée était postérieure à la démission du ministère dont M. Doumergue faisait partie. De ce fait, on peut déduire que ces brevets auraient été volés et remplis après coup au moyen de faux.

 

 

 


 

 

 

"Le scandale des décorations"
Journal "L'Aurore" du 24 juillet 1912 - Numéro 5359

 

 

La neuvième chambre du tribunal de police correctionnelles présidée par M. Ausset, a commencé, hier après-midi, l'affaire du scandale des décorations qui fit tant de bruit l'an dernier.

On sait que M. Valensi, l'avocat à la cour d'appel le plus profondément compromis dans cette affaire, a bénéficié d'une ordonnance de non-lieu en raison de son état mental qui serait, parait-il, des plus compromis.

Comparaissent seuls : Jules-Guillaume Meulemans, Paul Clementi, Pierre-Charles Dutruel, Edmond Evrard et Joseph Réveillard. Ils sont inculpés de trafics de récompenses.

M. le substitut Granié occupe le siège du ministère public, Mes Max Vincent, Félix Decori, Robert Bernstein, Alcide Delmont et de Lauwereyns de Rosendaal, ce dernier du barreau de Lille, assistent les prévenus. Les faits suivants ont été retenus par la prévention : En 1911, Meulemans procura à un nommé Watel, d'Amsterdam, deux faux diplômes de palmes, qui furent vendus 2.000 et 2.500 francs à. MM. Ten Kate, de La Haye, et Ludwigsen, de Copenhague. Meulemans a dit qu'il tenait les diplômes de Valensi et celui-ci de Clementi. Quant à l'argent, Meulemans prétend que c'était pour de la publicité et des participations financières !

En 1910, M Tittel, de la Haye, versa 2.000 francs à Watel pour un Nicham-lftikhar, Watel envoya l.500 francs à Meulemans. Le diplôme fut donné par Joseph Réveillard à Clementi, par Clemanti à Valensi, par Valensi à Meulemans. Il n'a pas été établi que les trois premiers aient touché de l'argent dans cette affaire.

De même, en 1910, Meulemans envoie contre 2.450 francs un Nicham à Van Lange, de Hambourg, qui le revend 3.000 francs à un nommé Prinz, de Berlin. En 1910, un nommé Schultze, de Berlin, paie 1.150 francs un Nicham. M. Delcourt, de Lunéville, en paie un autre 300 francs à M. Clementi. Même prix et même vendeur à M. Sergent. En février 1911, Valensi vend un Nicham 80 francs à M. Turnès. En 1910, à Lille, Pierre Dutruel et Edmond Evrard, rabatteurs de Valensi, reçurent de M. Vimont 1.323 francs pour un Nicham. Valensi reçut 725 francs, le reste fut gardé par les deux Lillois.

M. Vimont voulait obtenir le consulat d'Haïti à Lille. Il versa 1.500 francs à Dutruel qui envoya l.000 francs, dit-il, 510 francs seulement, justifie-t-il à Valensi. Mais le consulat n'arriva pas et Dutruel restitua les 1.500 francs à M. Vimont.

Tous ces Nicham vendus de 80 à 3.000 francs, d'autres donnés gratuitement, ont été fournis par Réveillard qui avait fait imprimer 1.000 diplômes et 1.000 certificats de traduction, fabriquer les fausses griffes, sceaux et cachets nécessaires.

Pour sa défense, Réveillard déclare qu'il n'a pas monnayé les diplômes et les a seulement échangés contre d'autres décorations non officielles. Il est seulement inculpé d'usage de sceaux, timbres ou marques contrefaites. Contre Meulemans, on retient également le trafic de Croix-Rouge d'Espagne. Valensi, Clementi, Evrard et Dutruel ont trafiqué également de décorations du Croissant rouge du Maroc, du Bien Public et du Mérite National, enfin de consulats de Counani.

A l'appel des témoins, on constate qu'aucun témoin à charge n'est présent ! Et l'interrogatoire commence aussitôt. Il est dénué de tout intérêt. Meulemans déclare : — J'ai toujours nié ma culpabilité, je le fais encore et je proclame hautement ma complète innocence. Clementi, Dutruel et Evrard se défendant également et rejettent tout sur Valensi. Réveillard est le seul des prévenus qui fasse bonne contenance. Il sourit au tribunal, à l'aimable compagnie. Il a l'allure d'un sous-officier en civil. Il se flatte d'avoir été en relations avec de hautes personnalités du Parlement, mais déclare qu'il taira leurs noms. Il reconnaît avoir fait fabriquer de faux diplômes du Nicham, mais prétend avoir ignorer le trafic qui en fut fait.

Le substitut donne alors lecture des dépositions de MM. Sergent et Vimont, puis on entend trois témoins à décharge cités à la requête de Meulemans et qui font l'éloge de celui-ci. M. le substitut Granié prononce alors son réquisitoire.

 

 

 


 

 

 

Le scandale des décorations
Journal "L'Homme Libre" du 17 février 1927 - Numéro 3860

 

 

JUGEMENT A HUITAINE

Il était 13h15 quand ont été repris hier, devant la 11e chambre correctionnelle, les débats de l'affaire Ruotte, Dumoulin et Camuset, et, l'audition des témoins se poursuivant, un commerçant de la place des Victoires est appelé à la barre. Ce commerçant dont les titres étaient incontestables a été décoré au titre de l'exposition des Arts décoratifs. Or, Camuset affirme que la candidature de ce commerçant lui avait été recommandée par Dumoulin ; il affirme encore qu'il avait parlé à Ruotte du dossier de ce candidat ; il persiste à soutenir qu'après la nomination de ce commerçant, Dumoulin lui avait remis 60.000 francs qu'il avait partagés avec Ruotte.

— Un ami personnel, M. Larivière, dit le commerçant, s'était particulièrement intéressé à ma candidature. Il y intéressa M. Lamoureux. J'étais en voyage, quand, par un journal, j'appris que j'étais décoré. Je ne connais aucun des trois inculpés. A aucun d'eux je n'ai versé d'argent.

— J'ai eu, dit Dumoulin, l'occasion de voir une fois le témoin qui ne se souvient pas de cette visite. J'étais venu, de la part de mon tapissier, lui demander des papiers de tenture qui, m'avait-on dit, étaient épuisés. Le témoin trouva dans son usine de quoi me donner satisfaction. Nos rapports n'allèrent pas plus loin.

— Quant à moi, dit Ruotte, je n'ai pas eu à m'occuper de la candidature du témoin, car la proposition dont il fut l'objet nous vint directement du cabinet du ministre.

— J'affirme avoir remis à Ruotte, dit Camuset, 30.000 francs sur les 60.000 que Dumoulin m'avait remis en me disant les avoir reçus en reconnaissance de la croix obtenue par le témoin. Je lui remis cette somme dans son bureau. J'ai le regret de soutenir que je dis bien la vérité. Je l'ai dite depuis le début. J'étais depuis en bonnes relations avec Dumoulin et Ruotte. Pour quel motif les chargerais-je aujourd'hui en m'accusant moi-même ?

— On a fouillé ma vie privée, s'écrie Dumoulin. On n'y a pas trouvé de dépôts en banque, mais Camuset en avait. Il lui a fallu les expliquer et alors pour se libérer il m'accuse. De la sorte, il n'a pas à donner les noms qu'il veut cacher ?

Camuset proteste et bientôt le débat va tourner tout à fait à l'aigre. Mes Lagoutte et Campinchi s'en mêlent en effet, et ce qui n'était pas très clair devient tout à fait obscur. En somme, chacun des inculpés demeure sur ses positions, tandis que, très calme à la barre, le témoin, sur le dos duquel on se bat, laisse passer l'orage. Profitant d'une éclaircie, le président le libère. Cependant, avant qu'il se retire Me Campinchi tient à lui poser une question :

— Le témoin a dit n'avoir rien versé. Il l'a affirmé. Bien. Quelqu'un de son entourage n'aurait-il pu faire le versement en question ?

— La chose est impossible.

— N'a-t-il pas eu à faire connaître sa comptabilité afin qu'on pût y rechercher la trace de la sortie des fonds qui nous préoccupent ?

— Cette vérification n'a pas été faite, dit le président.

Le témoin se retire.

— Et on laisse partir ainsi sans un mot de blâme, s'écrie Me Campinchi, un homme qui serait un corrupteur.

— Nous ne sommes pas ici en cour d'assises, réplique le président, et le témoin que nous venons d'entendre n'est pas un corrupteur !

Un autre témoin vient à la barre, M. Charmeil, conseiller d'Etat, directeur du personnel au ministère du commerce, qui fait l'éloge de Ruotte qu'il a eu sous ses ordres.

Finalement, après des débats qui n'apportent pas grande lumière, la solution est remise à huitaine.

 

 

 


 

 

 

"Le scandale des décorations devant la Cour d'appel"
Journal "L'Ouest-Eclair" du 27 juin 1927 - Numéro 9373

 

 

Paris, 21 juin. Cet après-midi, devant la Chambre des appels correctionnels, Marcel Ruotte, sous-chef de bureau au ministre du Commerce, Emile Dumoulin, publiciste et Louis Camuzet, dit Cams, tous trois condamnés, le 25 février dernier, par la onzième chambre correctionnelle, sous l'inculpation de trafic d'influence, à la prison et à l'amende, faisaient appel de ce jugement devant la Cour. Dès l'ouverture des débats, M. Boucard, président, donne lecture du rapport qui rappelle toute l'affaire des condamnations et apprécie notamment les conclusions déposées en ce qui concerne M. Ruotte. Celui-ci soulève, en effet, l'incompétence de la Cour et demande à être renvoyé devant les assises car, dit-il, je serai poursuivi pour corruption de fonctionnaires. Le président fait remarquer que Ruotte ne peut pas être poursuivi devant les assises, car lui-même a reconnu, au cours des précédents débats au tribunal correctionnel que son influence était nulle.

L'interrogatoire

On passe ensuite à l'interrogatoire. M. Camuzet confirme ses premiers aveux devant le tribunal correctionnel. Il reconnaît qu'il a reçu différentes gratifications et qu'il en a toujours remis la moitié à Marcel Ruotte. L'audience se poursuit dans le calme.

On remarque que M. Camuzet, prévenu libre, se trouve au premier rang devant le banc des avocats. Quant à Ruotte et à Dumoulin, ils sont dans le box des accusés.

En substance, M. Camuzet déclare qu'il n'y avait pas de prix convenu, contrairement à ce que semble établir le rapport de M. Boucard. Il termine d'une voix émue : « Je regrette profondément ce que j'ai fait. J'ai gâché tristement 60 années de vie honorable  ».

On interroge M. Emile Dumoulin. « Jamais je n'ai rien reçu de M. Camuzet, dit-il, jamais je n'ai touché. Tout ce que l'on raconte, c'est pure invention de M. Camuzet qui parle ainsi pour dissimuler la véritable source de l'argent qu'il toucha en divers endroits. »

M. Ruotte. — Je classais, je présentais les demandes pour décorations. Mon influence dont on a fait tant état existait certes comme fonctionnaire. Mais en dehors du ministère, elle était nulle et c'est bien compréhensible.

Les interrogatoires terminés. Me Barillet, au nom des « légionnaires qui ont obtenu la Légion d'honneur au péril de leur vie », prend la parole. Les légionnaires qui se sont portés partie civile demandent un franc de dommages-intérêts.

Après plaidoiries de Me Lagoutte et de Me Menesson, l'audience a été levée et la cour a renvoyé à huitaine la suite des débats.

 

 

 

 

 


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